L’essor d’un petit village grâce au bio
Situé au coeur de la Provence verte, c’est tout un village qui s’est converti au bio. L’activité économique du village qu’est la culture ancestrale de la vigne avait tendance à s’essouffler. Le maire Michaël Latz, ingénieur agronome mais aussi vigneron, a donc convaincu les viticulteurs de tout mettre en oeuvre pour que les terres de Correns soient cultivées selon l’agriculture bio . Sans nier l’importance des aides à la conversion mises en place par l’état pour ne pas abandonner l’économie principale liée au vin .
C’est ainsi qu’à partir de 1997, les terres agricoles AB ont permis d’augmenter la production locale et de garder ses jeunes. Alors qu’en 1999 le village comptait 675 habitants, ce dernier en recence aujourd’hui 800.
» Aujourd’hui la coopérative s’en sort très bien. De jeunes agriculteurs ont suivi le mouvement et se sont installés sur les terres de Correns. L’âge moyen est de 35 ans « , nous explique le maire de Correns, Michaël Latz.
Les naissances ont repris, et les commerces subsistent. Correns compte une épicerie, une boulangerie , un tabac-presse, un café, un restaurant, un hôtel-restaurant haut de gamme et de nombreux gîtes et chambres d’hôtes. La Poste n’a pas fermée ses portes de même que l’école maternelle-primaire.
95 % des terres du village sont cultivées selon les normes de l’agriculture biologique
Dix ans après la reconversion des vignes en bio, l’économie locale de Correns repose aujourd’hui essentiellement sur le travail de la vigne , l’huile d’olive, le miel , les cultures maraîchères, l’artisanat et le tourisme .
Une soixantaine d’agriculteurs labellisés AB
Une cave coopérative, un apiculteur, des éleveurs de volailles et producteurs d’oeufs, un céréalier, des maraîchers… En douze ans, le petit village a bien su développer ses activités.
» Nous cultivons les plantes à parfum et médicinales sur des terres bio en jachères. La distillerie les transforme en huiles essentielles. Les plantes aromatiques servent à l’alimentaire.
Un chevrier est désormais installé dans la forêt communale et son troupeau de chèvres entretient la forêt « , souligne l’ingénieur agronome.
Une douzaine de salariés du chantier d’insertion, formés aux métiers de l’environnement et de la protection de la nature, participent à la sauvegarde de cette forêt.
200 hectares de vignes bios certifiées par Ecocert
Quasiment tous les viticulteurs du village se sont tournés vers l’agriculture biologique. Ils font appel à la lutte biologique et à la confusion sexuelle pour la culture de leurs vignes . Celles-ci sont ensuite protégées à l’aide de produits naturels comme les algues marines, les extraits végétaux, le soufre. Les grappes sont cultivées sans pesticides, ni insecticides d’origine chimique puis désherbées mécaniquement. Pour l’entretien des sols, tous les désherbants sont proscrits. Seuls sont pratiqués le labour ou l’enherbement.
Avec ses 200 hectares de vignes situés dans l’aire d’appellation « Côtes de Provence » et « Vins de Pays du var », Correns se prévaut d’être le « premier village bio de France ».
Le vin bio de Correns correspond au règlement CEE 2092/91. Elaboré en limitant strictement l’emploi des additifs notamment le SO2, il est certifié par l’organisme Ecocert .
Le vallon Sourn, refuge écologique et tourisme vert
Correns abrite sur son territoire le vallon Sourn, un espace naturel sensible classé zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique. Celui-ci est réputé pour ses qualités écologiques et les espèces animales et végétales qui y trouvent refuge.
La faune aquatique renferme même les espèces les plus sensibles à la pollution.
» Nous sommes dans un périmètre de Natura 2000 , grand réseau européen de sites écologiques depuis 1992. Un comité scientifique a de fait réalisé un comptage des insectes dans le Var et nous a montré que notre village comptait beaucoup plus de variétés que dans les autres. La flore s’est beaucoup développée également. Les chasseurs sont les premiers à être contents à cause des nombreuses bêtes présentes sur le territoire ! « , nous souligne Michaël Latz.
Le vallon Sourn est également connu auprès des grimpeurs pour ses falaises, aménagées en site d’escalade par le Conseil Général du Var. » Avec la confédération de la montagne et de l’escalade, la commune a tenu il y a dix ans à ce que la pratique de l’escalade se fasse uniquement sur la rive gauche, bordée par l’Argens. Le site est ainsi contrebalancé par un déséquipement de la rive droite où un périmètre de protection naturelle a été mis en place. Les touristes ne portent pas atteinte de cette manière à la préservation de la nature. «
Un esprit éco-citoyen partagé
• Développement de l’éco construction
L’équipe municipale s’est tournée vers la démarche H.Q.E (Haute Qualité Environnementale) pour réhabiliter les locaux de la mairie. » Et nous sommes entrain de mettre en oeuvre une cantine scolaire et un centre aéré 100 % en éco construction « , confie le maire.
Seul bémol pour lui : » En ce qui concerne les permis de construire, nous avons plus de mal à convaincre les Corrensois de se tourner vers les habitats à économies d’énergie car le prix du foncier est très cher. L’éco construction est donc très dissuasif « .
Les conseils d’un ingénieur spécialisé dans ce domaine et plus spécialement dans les énergies renouvelables sont proposés gratuitement aux personnes déposant un permis de construire.
Mis en place d’un » Agenda Local 21 «
Un » Agenda 21 local » a été lancé sur les bons gestes à mettre en oeuvre des Corrensois.
» J’ai voulu faire cet Agenda suite à une enquête réalisée par une quinzaine d’étudiants de l’agro de Montpellier, qui a révélée que les habitants se sentaient très impliqués dans la démarche écologique du village. C’est pour cela que la commission de cet Agenda doit être constituée principalement de la population, pour qu’ils proposent des projets face aux enjeux du développement durable. Seuls quelques représentants municipaux en font partis. Elle est présidée par le dirigeant de la maison des sciences de l’Homme de Montpellier. Je veux qu’à travers cet Agenda les Corrensois se fixent aussi des objectifs comme réapprendre à manger moins de viande. Par ailleurs, 80 % de la nourriture servie aux enfants à la cantine est déjà bio « , argumente Michaël Latz, faisant référence au » Convivium » dont le village de la Provence verte fait partie. Un » Convivium » est un cercle local du mouvement Slow Food qui contribue notamment au développement de l’agriculture durable grâce à une agriculture moins intensif et nocif, capable de préserver et d’améliorer la biodiversité.
Une » Fête de la Bio et du Naturel »
Sous l’impulsion des maîtres vignerons bio de Correns, cette fête destinée au grand public a lieu chaque 3éme week-end d’août depuis 2000.
» 150 stands seront présents cette année. Les gens peuvent trouver des aliments biologiques, des matériaux d’éco-construction, des produits de beauté et de soins biologiques… Nous faisons attention à ce que les stands soient vraiment bio ; ils doivent justifier de leur acticité bio par un certificat « , garantit le maire de Correns.
La commune a été récompensée en 2001 pour sa politique globale (trophées des éco-actions des éco-maires de France) et en 2002 par le ministère de l’environnement (label » Merci dit la Planète « ).
Mais le maire du village, Michaël Latz, a une prochaine étape en vue : « Les Italiens ont créé l’association des villages bio d’Italie, pour la promotion de l’agriculture bio et je souhaiterais lancer ce type d’association en France ».
A quand une dizaine de villages bio en France ?
Emilie Villeneuve