L’Homme est à l’origine de la plupart des extinctions des espèces endémiques
Pour la première fois, la Liste rouge des espèces menacées en France est consacrée à l’outre-mer, avec de premiers résultats publiés pour La Réunion. Et le bilan est plutôt critique ; les espèces que l’on ne trouve qu’à la Réunion sont mal en point.
Plus d’un tiers des poissons d’eau douce et près de la moitié des crustacés de l’île sont en danger d’extinction et le quart des espèces d’oiseaux de l’île a déjà disparu, selon le recensement de l’UICN publié le 1er juillet dernier, réalisé avec le Muséum national d’Histoire naturelle et des organisations locales.
Tandis que 2010 est l’Année internationale de la biodiversité, « l’état des lieux fait clairement apparaître un fort taux d’extinction chez les oiseaux et les reptiles terrestres », indique l’UICN.
« Près du quart des espèces d’oiseaux de l’île de la Réunion sont désormais éteintes », soit 13 espèces sur les 55 qui étaient présentes avant l’arrivée de l’Homme.
Et parmi elles, onze étaient endémiques de l’île (une espèce biologique est dite endémique d’une zone géographique lorsqu’elle n’existe que dans cette zone à l’état spontané). C’est le cas du tuit-tuit, un petit oiseau encore présent sur l’île mais qui est victime des rats et des chats introduits par les navigateurs. Aujourd’hui il est classé « en danger critique d’extinction » tout comme le renard volant de Maurice, appelé roussette noire, disparu de l’île entre 1772 et 1801, probablement en raison de la chasse et de la destruction de son habitat due à la déforestation.
Une fois disparue de l’île, ces espèces seront donc considérées comme éteintes à la surface de la planète.
Lire « 17 291 esppèces menacées d’extinction dans le monde selon la Liste rouge de l’UICN «
Un patrimoine naturel hautement menacé
L’île de La Réunion héberge de nombreuses espèces qui ne se rencontrent nulle part ailleurs. » Ces espèces confèrent à la France, garante de leur survie sur la planète, une très forte responsabilité patrimoniale « , souligne l’UICN.
Parmi les reptiles terrestres
Les trois espèces indigènes présentes à La Réunion sont toutes menacées. Le gecko vert de Bourbon, victime de la dégradation et de la fragmentation de son habitat forestier, est classé dans la catégorie « En danger » tandis que le gecko vert de Manapany est » En danger critique d’extinction » de part par l’urbanisation et les plantes exotiques envahissantes qui entraînent la dégradation de son habitat.
Chez les insectes
Une espèce de papillons de jour sur sept et plus d’une espèce de libellules et demoiselles sur cinq sont menacées de disparition. Parmi ces espèces, le salamide d’Augustine, un papillon « En danger critique d’extinction », est affecté par la raréfaction du bois d’ortie, son unique plante nourricière.
Dans les eaux douces
Un tiers des poissons et près de la moitié des macro-crustacés sont menacés, principalement par la surpêche et les aménagements de rivières qui entravent leur migration. C’est le cas par exemple de la chevrette australe, une crevette classée « Vulnérable », et de l’anguille du Mozambique, « En danger critique d’extinction », très prisée par les pêcheurs et les braconniers et dont la survie dépend de sa libre circulation entre le milieu d’eau douce et le milieu marin.
Quant au milieu marin
L’urbanisation croissante du littoral et le développement des activités humaines dans les eaux côtières fragilisent des espèces comme la baleine à bosse et la tortue verte, respectivement classées « Vulnérable » et « En danger ». La tortue verte, dont la chair et les oeufs ont été massivement consommés jusque dans les années 1980, est désormais protégée depuis 1983, mais elle fait encore parfois l’objet d’actes de braconnage.
Quelles actions ?
» Pour répondre à la situation préoccupante de nombreuses espèces, d’importants efforts de conservation sont déployés à La Réunion par les associations locales, les scientifiques, les gestionnaires d’espaces naturels et les autorités locales. Un programme de lutte contre les rats a par exemple été mis en place pour préserver les derniers tuit-tuit. Des plages ont été réhabilitées pour offrir aux Tortues vertes de nouveaux sites de pontes. Une charte pour une approche et une observation responsables des baleines à bosse a été réalisée pour assurer la tranquillité de ces espèces en mer. Plusieurs plans nationaux d’action sont en cours d’élaboration pour les espèces les plus menacées. Et de nombreux espaces naturels de l’île bénéficient d’aires protégées.
Il s’agit désormais de ne pas relâcher les efforts, pour assurer toutes les chances de préserver ce patrimoine naturel exceptionnel mais hautement menacé « , conclut l’UICN.
Après la Réunion, la Guadeloupe sera bientôt également examinée à la loupe.
Emilie Villeneuve