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Environnement : les menteurs de la com épinglés

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Les champions français du double discours écologique et du " greenwashing " sur le développement durable viennent de se voir décerner malgré eux les " Prix Pinocchio 2010 " à l'issue d'un vote de 6000 internautes.

Environnement : les menteurs de la com épinglés

Créés par  » Les Amis de la Terre  » pour  » dénoncer les entreprises françaises en contradiction avec le concept de développement durable qu’elles utilisent dans leur communication « , les  » Pinocchio 2010  » viennent d’être attribués.

Je lave plus vert

Dans la catégorie greenwashing, c’est le Crédit Agricole, déjà nominé en 2009, qui a remporté la palme avec 55% des votes pour sa communication  » It’s time from green banking «  qui laisse entendre que la banque a choisi de privilégier les valeurs de croissances durables alors qu’elle continue à investir massivement dans les énergies fossiles.

Le 2ème Prix a été décerné à Renault-Dacia (20% des votes) pour sa publicité concernant un 4X4  » Ouster  » qui est présenté comme  » respectueux de l’environnement  » alors que les émissions moyennes de ce véhicule sont de 172g de CO2/km, contre 90g pour les véhicules les moins polluants. Renault a quand même changé son texte publicitaire pour le remplacer par  » plus respectueux de l’environnement « . Ca change tout…

Le 3ème Prix a été décerné à la SNCF pour sa campagne de publicité en faveur du train,  » Objectif 0% de CO2 ou presque « . Or il est presque impossible d’atteindre le 0% de CO2. Et ce n’est pas, bien entendu, le seul critère qui compte pour dire que le train est  » safe  » en termes de pollution. L’électricité utilisée par le train provient en effet des 15 centrales thermiques à flammes françaises qui fournissent environ 10% de l’électricité et qui fonctionnent en utilisant des combustibles fossibles ( charbon,fioul, gaz) gros émetteurs de gaz à effet de serre. Et elle provient aussi des centrales nucléaires qui, si elles ne produisent pas de CO2, génèrent de très grandes quantités de déchets radioactifs qu’on ne sait toujours pas éliminer et qui vont être toxiques pendant des milliers d’années.

J’aime l’environnement à mourir

Dans la catégorie  » Environnement  » la palme a été décernée à Eramet, un groupe spécialisé dans l’industrie minière, pour ses projets d’exploitation d’une mine de nickel en Indonésie, a Weda Bay, dans la province des Molluques du nord, et qui vont lourdement impacter sur la biodiversité. Eramet tient pourtant un discours d’entreprise citoyenne dans le développement durable.
Il est intéressant de noter que 25,63% du capital d’Eramet est détenu par le Groupe Areva dont l’Etat français détient 87% du capital… L’Etat du Gabon est aussi un gros actionnaire d’Eramet.

Le 2ème Prix a été décerné à Total (29% des votes) pour son projet d’exploitation des sables bitumeux pour extraire du pétrole dans le sous-sol de l’Etat d’Alberta au Canada. Total communique en disant que le groupe veut  » fournir de l’énergie en veillant à la lutte contre le changement climatique « . Mais cette exploitation, d’une surface équivalente à la Grèce, aura des conséquences désastreuses pour l’environnement, car elle entrainera un déboisement total de la région, et pour le climat, car les techniques d’extraction du pétrole des sables bitumeux sont émettrices de 3 à 5 fois plus de gaz à effet de serre que les techniques utilisées pour extraire le pétrole conventionnel.

Enfin le 3ème Prix a été attribué à Alstom (19% des votes) pour sa participation à la construction d’une centrale thermique en Afrique du Sud qui fonctionnera au charbon, la source d’énergie la plus polluante qui soit en termes de gaz à effet de serre. Les estimations évaluent l’émission de CO2 de la centrale à 25 millions de tonnes, soit l’équivalent de 5% des émissions annuelles actuelles de la France. Alstom a pourtant créé sa Fondation d’entreprise pour  » préserver l’environnement dans le cadre d’une croissance responsable « .

Réglementer la communication verte

Un ouvrage très intéressant,  » La communication responsable « , vient d’être édité par les  » Editions d’Organisation « . Il a pour objectif, expliquent les auteures, Alice Audoin, Anne Courtois, et Agnès Rambaud-Paquin, des expertes en communication dans le développement durable, de  » donner à tout professionnel de la communication des repères pour comprendre et agir…et pour éviter un certain nombre de pièges parmi lesquels le  » greenwashing  » qui constitue, tant pour les annonceurs que pour l’ensemble des professionnels de la communication, un risque réel de dégradation de leur image face à un public de plus en plus conscient des impacts environnementaux des produits ou des services qu’on lui vend « . Une bonne idée de cadeau de fin d’année pour les personnes concernées.

Lire : Un guide pratique pour intégrer le développement durable dans les métiers de la com

Mais au-delà de  » l’image « , il serait bien nécessaire d’instituer une règlementation stricte afin que les concepts d’  » écologie  » et de  » développement durable  » ne soient pas galvaudés, mais profondément respectés.

Dans ce sens Chantal Jouanno, Secrétaire d’Etat à l’Ecologie, a annoncé la publication d’un  » Guide pratique des allégations environnementales sur les produits «  qu’elle a présenté le 10 novembre avec Hervé Novelli. Ce guide est issu des travaux du Conseil National de la Consommation. Il a pour objectif de clarifier et guider les professionnels et les consommateurs, confrontés à des allégations environnementales croissantes telles que :  » bio « ,  » durable « ,  » naturel  » ou  » responsable « .
Mais sans un vrai cadre juridique contraignant, le  » greenwashing  » sera-t-il abandonné ?

Hervé de Malières

A lire aussi : Les mesures du gouvernement pour favoriser la consommation durable

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