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"Il n’y a pas de vrai ou de faux bio"

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Suite à la diffusion du documentaire "Grandes surfaces : main basse sur le bio" sur France 2, l'Agence Bio tient à rassurer les consommateurs.

L’émission Complément d’enquête (France 2) a diffusé le 30 septembre un documentaire intitulé « Grandes surfaces : main basse sur le bio« , qui traite de la « crise de croissance » du Bio en France, de la complexité de la problématique du bio à grande échelle et des dérives qu’elle peut engendrer. Un documentaire qui montre finalement qu’il peut y avoir Bio et Bio…

Suite à la diffusion de ce reportage, l’Agence Bio* (le groupement d’intérêt public en charge du développement, de la promotion et de la structuration de l’agriculture biologique française) souhaite aujourd’hui rassurer les consommateurs sur les garanties qu’apporte la certification bio sur les produits mais aussi sur le contrôle de la croissance du marché.

Voici leur communiqué :

La demande de bio et de bio français, étant croissante depuis plus de 20 ans, l’agriculture et la transformation françaises en bio connaissent un important changement d’échelle.

Sur le thème de l’industrialisation du bio, rappelons que :

  • La taille moyenne des exploitations en bio en France est 20% plus petite que la moyenne nationale toutes exploitations confondues. Le lien au sol est obligatoire et la taille des exploitations agricoles est nécessairement limitée : le producteur devant principalement nourrir ses animaux avec ce qu’il produit sur sa ferme.
  • Le bio est produit par un tissu dynamique de PME partout sur le territoire.
  • Avec 56% du marché du bio vendu en grande distribution, la vigilance reste cruciale pour que le bio reste un modèle économique rémunérateur pour l’amont et pour l’aval. La contractualisation pluriannuelle, dans l’ADN du bio historique, reste un rempart contre les aléas du marché et la volatilité des prix.
  • Les situations de surproduction évoquées sur certains produits sont conjoncturelles, tandis que la demande de bio reste structurelle : Le bio est présent dans les achats de 9 français sur 10, y compris dans les populations avec un moindre pouvoir d’achat ; 68% des 18/ 24 ans déclarent venir au bio pour préserver la planète, on peut supposer que ce motif est durable.

Cette croissance du bio reste encadrée et contrôlée.

Tous les acteurs des filières bio françaises sont mobilisés sur le sujet pour oeuvrer au maintien d’un développement cohérent de l’agriculture biologique, d’une juste rémunération et d’un accroissement de sa consommation.

La croissance se fait dans le cadre réglementaire du cahier des charges européen qui s’applique à tous les opérateurs en bio, agriculteurs, transformateurs et distributeurs, uniformément sur le territoire européen. Elle est contrôlée a minima une fois par an par 12 organismes certificateurs agréés en France par l’INAO et accrédités par le COFRAC.

La certification bio est aujourd’hui la certification publique la plus exigeante, pour répondre aux enjeux majeurs de lutte contre le changement climatique, de préservation de la biodiversité, de restauration de la qualité des eaux…

C’est donc l’occasion de rappeler qu’il n’y a pas de vrai ou de faux bio.

Un produit bio reste un produit biologique, quelle que soit la taille du producteur. Certifié bio, il apporte la garantie que l’ensemble des critères exigés par le règlement européen a été respecté lors de son élaboration, c’est-à-dire sans produits chimiques de synthèse, dans le respect du lien au sol et du bien-être animal.

Rappelons que le bio est LE label reconnu et plébiscité…

En particulier le bio national, voir local : le bio est un facteur clef de la souveraineté alimentaire, avec 80% du bio consommé en France produit nationalement (hors produits tropicaux non produits en métropole).

Avec 98% de notoriété, la marque AB reste le point de repère des Français dans cette période de transition alimentaire

Et la place de la France sur le marché du bio :

Le marché fait face à une croissance à 2 chiffres depuis 20 ans et représente aujourd’hui 13 milliards d’euros, soit le 2ème marché européen après l’Allemagne

La France est le premier pays européen en production bio, avec bientôt 10% de sa surface agricole cultivée en bio et 12% de ses agriculteurs convertis.

– Fin de communiqué –

Les dérives du « bio business » sont-elles évitables ?

Comme le rappelle l’Agence Bio, avec 56% du marché du bio vendu aujourd’hui en grande distribution, oui la vigilance reste cruciale ! La vigilance des Pouvoirs publics, mais aussi celle des consommateurs !

Il y a quelques années, alors que le succès du bio allait grandissant, les acteurs de la grande distribution se sont trouvés bien embêtés : ils ne proposaient que des produits conventionnels (non bio) et perdaient des parts de marché, de nombreux consommateurs favorisant les magasins bio spécialisés.

Alors que faire ? Comment récupérer les consommateurs ? Ils ont trouvé trois solutions :

1/ Dans un premier temps, ils ont semé le doute et la confusion pour instaurer une crise de confiance. Pour décrédibiliser le bio, ils ont favorisé une multitudes d’autres labels (« made in France », « zéro résidus de pesticides », « bleu-blanc-coeur », « C’est qui le patron », « Label Rouge », « filières Responsable »,…). Objectif : faire passer le bio en second plan voire carrément le faire oublier pour faire revenir les consommateurs aux produits conventionnels. Et ça a marché ! Le consommateurs s’est retrouvé complètement perdu face au trop plein de labels alimentaires, n’arrivant plus toujours à distinguer les labels vertueux du « greenwashing », et privilégiant finalement les produits locaux aux produits bio.

2/ Dans un second temps, ils ont créé leurs propres gammes bio (un peu selon leurs règles en exploitant quand ils le pouvaient les failles du label bio AB existant). Objectif : proposer du bio pas cher, et tout faire (à grand renfort de publicité) pour que le consommateurs ne fassent pas/plus la différence entre le bio de qualité et le bio industriel.

3/ Et finalement (quelques années plus tard et voyant que les consommation bio allait encore en grandissant), ils ont décidé de racheter les enseignes de magasins bio pour avoir une main-mise quasi totale sur le marché bio en France, en gérant ainsi les achats en GMS et en magasins spécialisés. Carrefour a ainsi racheté le site de e-commerce Greenweez et plus récemment l’enseigne Bio c’ Bon, Naturalia appartient au Groupe Casino, le Groupement Les Mousquetaires est rentré au capital du groupement Les Comptoirs de la Bio,…

Comment dans ce contexte être optimiste quant à l’avenir du bio en France, les industriels ayant tout intérêt à tirer le label vers le bas pour faciliter la production et la vente des produits ?…

Claude Gruffat, alors président de Biocoop (et maintenant Député européen), alertait déjà en 2017 sur les risques de l’émergence d’une bio industrielle dont le seul objectif est de proposer des produits bio pas chers, peu importe comment. Il expliquait lors d’une interview pour Bioaddict.fr : « Le risque d’une bio industrielle, hors sol, de faibles qualités nutritives, est bien réel. De la bio à bas prix peut être proposée quand l’aspect social et environnemental est dégradé. Si on reprend le modèle conventionnel en bio, on aura les mêmes effets et les mêmes conséquences qu’avec l’agriculture conventionnelle. « 

Reprendre le modèle conventionnel. Voilà tout le problème. La grande distribution reproduit le modèle existant. Et c’est ainsi que nous sommes depuis quelques temps à un tournant du bio, parce qu’on assiste à l’émergence fulgurante du bio industriel, dans le sens péjoratif du terme. Mais attention. Cela va également de paire avec la volonté des consommateurs de voir le bio se démocratiser, et d’être à la portée de toutes les bourses. La grande distribution offre finalement aussi ce que le consommateur lui demande. Des produits bio pour tous et tout le temps. Offrant ainsi la possibilité à ses clients de consommer des tomates bio venant d’Espagne en plein hiver…

C’est ainsi aussi à nous consommateurs d’être responsables et vigilants quand nous faisons nos courses. En comprenant, et en acceptant, que les bons produits bio, locaux, éthiques (qui permettent aux producteurs d’être justement payés), sont forcément un peu plus chers. Choisir de consommer des produits bio, de saison, issus majoritairement de filières françaises, reste le meilleur moyen de protéger sa santé, l’environnement, et de contribuer au développement d’une économie durable en France. Et de contribuer à l’émergence d’un monde meilleur ! Non le mot n’est pas trop fort, n’oubliez jamais que le pouvoir de changer le monde (et les choix des industriels) est dans le caddie du consommateur !

Choisir de mieux consommer d’accord, mais peut-on faire confiance au label « AB » ? et la réponse est oui ! Car même s’il comporte peut-être quelques failles, il est (en tout cas pour l’instant) d’une grande exigence ! Et nous avons la chance en France d’avoir un très grand choix de produits bio de qualité, issus de petites ou plus grandes entreprises réellement engagées dans une démarche de développement durable.

Le fait que la grande distribution et les industriels doivent comprendre que les produits bio que nous voulons doivent impérativement associer qualité et engagements sociaux et environnementaux. Auquel cas nous ne les acheterons tout simplement plus.

Christina Vieira

* L’Agence Bio rassemble au sein de son conseil d’administration, des représentants des Pouvoirs publics – le Ministère de la Transition écologique – le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation – et des professionnels (FNAB, APCA, Synabio et la Coopération Agricole )

Crédit photo @monticellllo

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