Un capital naturel dans le rouge
Alors que 2010 est l’Année internationale de la biodiversité, les ressources naturelles disparaissent à un rythme alarmant, sans précédent depuis l’extinction des dinosaures il y a 65 millions d’années, selon l’ONU.
Lors du Sommet mondial en 2002 à Johannesburg en Afrique du Sud, la communauté internationale s’est engagée à ralentir la perte de la biodiversité à l’horizon 2010.
Pourtant, aujourd’hui, les objectifs sont loin d’être atteints : les espèces disparaissent actuellement à un rythme mille fois supérieur à la normale, 11 % des zones naturelles qui existaient encore en 2000 pourraient disparaître prochainement, 50 % des zones humides ont été asséchées et au cours des 300 dernières années, la superficie forestière mondiale a diminué d’environ 40 %, les forêts ayant totalement disparu dans 25 pays !
» Les mesures de conservation sont effectives, mais elles ne sont tout simplement pas suffisantes. Après de grands bouleversements de la biodiversité, le rétablissement est difficile, coûteux, et trop souvent impossible « , souligne l’UICN, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
« Cette réunion s’inscrit dans le cadre des efforts menés pour répondre à une réalité toute simple, nous sommes en train de détruire la vie sur Terre , a déclaré à l’ouverture de la conférence Achim Steiner, directeur du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). C’est de notre vie qu’il s’agit. C’est la vie sur cette planète qui est en jeu et il ne faut pas que la génération à venir nous accuse d’avoir été irresponsables ».
Et pour cela, le monde ne doit pas rester inerte, il doit inverser pour de bon la tendance même si les enjeux de ce sommet sont avant tout écomiques avant d’être écologiques.
Selon une étude publiée ce mois-ci sous les auspices de l’Onu, les dégâts causés à l’environnement par l’activité humaine en 2008 ont engendré 6 600 milliards de dollars, soit 11 % du PIB mondial.
Les relations Nord-Sud au coeur des préoccupations
Pendant ces 10 jours de négociations, les délégués vont devoir réaliser les objectifs pour enrayer la perte en biodiversité, qui avaient été fixés lors de l’adoption de la première Convention en 1992. Pour cela, ils planchent sur trois principaux dossiers :
– fixer de nouveaux objectifs pour enrayer la perte des espèces à l’horizon 2020,
– trouver un accord international sur les conditions d’accès des industries du Nord aux ressources génétiques des pays du Sud,
– dessiner l’évolution de l’aide aux pays les plus pauvres pour protéger leurs ressources naturelles.
Mais le coeur des débats de la Convention sur la biodiversité se fera sur la recherche d’un cadre juridique pour répartir équitablement les bénéfices tirés de l’exploitation des ressources génétiques possédées par les pays du Sud, des plantes pour l’essentiel, avec des utilisations dans la pharmacie, la chimie ou les cosmétiques. C’est l’enjeu du protocole » Access and Benefit Sharing » (ABS) dont la signature marquera soit le succès soit l’échec du rendez-vous de Nagoya.
« Pour nous, il n’est pas acceptable d’aller à Nagoya et de ne pas aboutir à un protocole ABS », a averti début octobre la ministre brésilienne de l’Environnement, Izabella Teixeira. « C’est le point clé ».
Plusieurs pays du Sud ont d’ailleurs lié cette négociation à celle sur la création d’un « Giec de la biodiversité » (IPBES), qui permettrait de disposer d’un outil de mesure fiable pour éclairer les décideurs politiques.
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Dans le cadre du » grand plan » pour enrayer le déclin de la biodiversité, cette réunion de Nagoya appelle ainsi à évoluer vers une économie écologique.
Le budget consacré dans le monde à la préservation de la biodiversité est actuellement de trois milliards de dollars. Certains pays en développement estiment qu’il en faudrait cent fois plus d’ici 2020.
Cependant, aux dernières nouvelles, les discussions peinent à Nagoya, notamment à cause des divergences entre pays en développement et pays développés.
La biodiversité va-t-elle réussir à sauver sa peau ?
Emilie Villeneuve
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