Accueil / Articles / Environnement / La biodiversité va-t-elle sauver sa peau à Nagoya ?
biodiversitéPolitique

La biodiversité va-t-elle sauver sa peau à Nagoya ?

Mis à jour le

Publié le

Le Japon héberge depuis le 18 jusqu'au 29 octobre 2010, à Nagoya, la dixième Conférence des Parties (COP10) de la Convention sur la diversité biologique. Les 193 pays signataires de la convention, dont la France, doivent se fixer de nouveaux objectifs pour l'après 2010 afin de lutter contre l'érosion de la biodiversité et de défendre les écosystèmes.

Un capital naturel dans le rouge

Alors que 2010 est l’Année internationale de la biodiversité, les ressources naturelles disparaissent à un rythme alarmant, sans précédent depuis l’extinction des dinosaures il y a 65 millions d’années, selon l’ONU.

Lors du Sommet mondial en 2002 à Johannesburg en Afrique du Sud, la communauté internationale s’est engagée à ralentir la perte de la biodiversité à l’horizon 2010.

Pourtant, aujourd’hui, les objectifs sont loin d’être atteints : les espèces disparaissent actuellement à un rythme mille fois supérieur à la normale, 11 % des zones naturelles qui existaient encore en 2000 pourraient disparaître prochainement, 50 % des zones humides ont été asséchées et au cours des 300 dernières années, la superficie forestière mondiale a diminué d’environ 40 %, les forêts ayant totalement disparu dans 25 pays !

 » Les mesures de conservation sont effectives, mais elles ne sont tout simplement pas suffisantes. Après de grands bouleversements de la biodiversité, le rétablissement est difficile, coûteux, et trop souvent impossible « , souligne l’UICN, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.

« Cette réunion s’inscrit dans le cadre des efforts menés pour répondre à une réalité toute simple, nous sommes en train de détruire la vie sur Terre , a déclaré à l’ouverture de la conférence Achim Steiner, directeur du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). C’est de notre vie qu’il s’agit. C’est la vie sur cette planète qui est en jeu et il ne faut pas que la génération à venir nous accuse d’avoir été irresponsables ».

Et pour cela, le monde ne doit pas rester inerte, il doit inverser pour de bon la tendance même si les enjeux de ce sommet sont avant tout écomiques avant d’être écologiques.

Selon une étude publiée ce mois-ci sous les auspices de l’Onu, les dégâts causés à l’environnement par l’activité humaine en 2008 ont engendré 6 600 milliards de dollars, soit 11 % du PIB mondial.

Les relations Nord-Sud au coeur des préoccupations

Pendant ces 10 jours de négociations, les délégués vont devoir réaliser les objectifs pour enrayer la perte en biodiversité, qui avaient été fixés lors de l’adoption de la première Convention en 1992. Pour cela, ils planchent sur trois principaux dossiers :

– fixer de nouveaux objectifs pour enrayer la perte des espèces à l’horizon 2020,
– trouver un accord international sur les conditions d’accès des industries du Nord aux ressources génétiques des pays du Sud,
– dessiner l’évolution de l’aide aux pays les plus pauvres pour protéger leurs ressources naturelles.

Mais le coeur des débats de la Convention sur la biodiversité se fera sur la recherche d’un cadre juridique pour répartir équitablement les bénéfices tirés de l’exploitation des ressources génétiques possédées par les pays du Sud, des plantes pour l’essentiel, avec des utilisations dans la pharmacie, la chimie ou les cosmétiques. C’est l’enjeu du protocole  » Access and Benefit Sharing  » (ABS) dont la signature marquera soit le succès soit l’échec du rendez-vous de Nagoya.

« Pour nous, il n’est pas acceptable d’aller à Nagoya et de ne pas aboutir à un protocole ABS », a averti début octobre la ministre brésilienne de l’Environnement, Izabella Teixeira. « C’est le point clé ».

Plusieurs pays du Sud ont d’ailleurs lié cette négociation à celle sur la création d’un « Giec de la biodiversité » (IPBES), qui permettrait de disposer d’un outil de mesure fiable pour éclairer les décideurs politiques.

Lire  » Biodiversité : un réseau mondial va être crée « 

Dans le cadre du  » grand plan  » pour enrayer le déclin de la biodiversité, cette réunion de Nagoya appelle ainsi à évoluer vers une économie écologique.

Le budget consacré dans le monde à la préservation de la biodiversité est actuellement de trois milliards de dollars. Certains pays en développement estiment qu’il en faudrait cent fois plus d’ici 2020.

Cependant, aux dernières nouvelles, les discussions peinent à Nagoya, notamment à cause des divergences entre pays en développement et pays développés.

La biodiversité va-t-elle réussir à sauver sa peau ?

Emilie Villeneuve

Lire « Le CNRS vous invite à la découverte de la biodiversité dans les jardins du Trocadéro »

Info+

Les thèmes abordés à Nagoya

- Biodiversité agricole
- Biodiversité des terres arides et sub-humides
- Biodiversité forestière
- Biodiversité des eaux intérieures
- Biodiversité insulaire
- Biodiversité marine et côtière
- Biodiversité des montagnes

Les questions multisectorielles

- La cible biodiversité 2010
- Accès aux ressources génétiques et partage des avantages
- Biodiversité et développement
- Changements climatiques et biodiversité
- Communication, éducation et sensibilisation du public
- Économie, commerce et mesures d'incitation
- Approche écosystème
- Stratégie mondiale pour la conservation des plantes
- Initiative mondiale en taxonomie
- Évaluation d'impact
- Identification, surveillance, indicateurs et évaluations
- Espèces exotiques envahissantes
- Responsabilité et réparation
- Aires protégées
- Utilisation durable de la biodiversité
- Transfert de technologie et coopération
- Tourisme et biodiversité
- Savoir, innovations et pratiques traditionnelles

La politique française de préservation de la biodiversité

A Nagoya, six priorités seront mises en avant par la délégation française conduite par l'ambassadeur délégué à l'environnement ainsi que l'ambassadeur de France au Japon.

La France sera tout particulièrement attentive à ce que la COP10 s'attache à :

- favoriser l'intégration de la biodiversité dans les politiques sectorielles au niveau national et international ;

- renforcer les aires protégées et leur connectivité, et conforter des engagements spécifiques aux milieux marins ;

- préserver les espèces menacées ;

- faire progresser la prise en compte des bénéfices liés à la biodiversité, notamment les services rendus par les écosystèmes, en prenant en compte l'ensemble des valeurs de la biodiversité (" valeur économique totale ") ;

- valoriser les rapports TEEB (The Economics of Biodiversity and Ecosystem Services) et promouvoir leur prise en compte (notamment en tant qu'outils d'aide à la décision) et leur suivi ;

- conforter les liens changement climatique/biodiversité, notamment sur le rôle des forêts dans l'atténuation et le stockage du carbone et les effets sur l'environnement marin. Cette stratégie gagnante pourra être imaginée dans d'autres écosystèmes, en priorité les zones humides ;

- encourager la mise en oeuvre de mécanismes de financement innovants, tels que les paiements pour services écosystémiques ou la fiscalité incitative, en complément des financements publics existants pour la biodiversité.

(Source : www.biodiversite2010.fr, portail français de l'Année Internationale de la Biodiversité)

Partagez cet article :