Le sabotage de Copenhague par les multinationales
Les organisations Attac Danemark, Corporate Europe Observatory, Focus on the Global South, Friends of the Earth International, Oil Change International et Spinwatch se sont réunies pour organiser le grand prix de la sirène en colère.
» Le Prix de la Sirène en Colère a été organisé pour montrer le rôle pervers des lobbyistes des multinationales et pour mettre en lumière ces groupes d’affaires et entreprises qui ont fait les efforts les plus considérables pour saboter les négociations climatiques, et les autres mesures relatives au climat, tout en promouvant de fausses solutions, bien souvent profitables « , expliquent-ils sur le site Angry Mermaid Award.
Les huit candidats ont été présentés au public sur ce site et les participants du Klimaforum, le forum de la société civile, ont également été invités à voter.
Ce « Grand Prix » a été décerné le mardi 15 décembre dernier, pendant le sommet de Copenhague, par Naomi Klein, journaliste, chroniqueuse au New York Times et auteur de « La Stratégie du Choc : La Montée d’un capitalisme du Désastre ».
Monsanto est en haut du podium avec 37 % du total des voix. Shell a obtenu 18 % des suffrages suivi de l’Institut Américain du Pétrole qui a reçu 14 % des votes.
Le Prix de la Sirène en Colère tire son nom de la sirène, icône de Copenhague, mise en colère par les destructions causées par le changement climatique. Lisez l’histoire de la sirène en colère.
Les huit nominés pour le prix de la petite sirène en colère
Les votes se sont répartis entre :
– La Coalition américaine pour l’électricité à base de charbon propre (ACCCE)
L’American Coalition for Clean Coal Electricity (ACCCE), littéralement » coalition américaine pour l’électricité à base de charbon propre « , est l’organisme de relations publiques de l’industrie du charbon américaine.
– L’Institut américain du Pétrole (API)
L’American Petroleum Institute (API) est » le groupe de pression principal de l’industrie pétrolière aux États-Unis « , représentant quelque 400 entreprises qui couvrent l’éventail de l’industrie du pétrole et de l’essence, des géants aux petits indépendants.
– Le Conseil européen de l’Industrie Chimique (CEFIC)
Les principaux acteurs de l’industrie chimique européenne sont tous membres du conseil européen de l’industrie chimique (Cefic), qui, selon les organisateurs du prix, » exercent des pressions pour leur compte au niveau de l’Union européenne « . Ses membres comprennent les géants de l’industrie chimique que sont Arkema, BASF, Bayer, Dow, DuPont, ExxonMobil Chemical, Shell Chemicals et Solvay.
– L’association internationale du Transport aérien (IATA)
L’Association Internationale du Transport Aérien (International Air Transport Association ou IATA) est » le principal groupe de pression représentant l’industrie du transport aérien « . Elle compte parmi ses membres les compagnies de vols long-courriers prédominantes que sont American Airlines, British Airways, Cathay Pacific, KLM, Lufthansa, Qantas et United Airlines.
– L’Association internationale pour l’échange de droits d’émission (IETA)
L’International Emissions Trading Association (IETA), ou » Association internationale pour l’échange de droits d’émission » se décrit comme une » organisation d’affaires à but non-lucratif » créée pour » établir un cadre pour l’échange dans le domaine des réductions d’émission de gaz à effet de serre « . Formée en 1999, elle regroupe 168 entreprises membres, dont font partie des compagnies d’énergie (BP, Shell, Vattenfall) ; des banques (BNP Paribas, Goldman Sachs) ; des cabinets d’avocats (Clifford Chance, Norton Rose) ; et des entreprises spécialisées dans les échanges d’émissions (dont EcoSecurities). Elle travaille en partenariat avec des organismes comme la Banque mondiale pour développer un marché des gaz à effet de serre » actif et mondial « .
– Monsanto
Monsanto est la plus grande entreprise de semences au monde, et fait polémique depuis plus de dix ans en faisant la promotion de cultures d’organismes génétiquement modifiés (OGM). Selon Monsanto, les cultures OGM ne sont pas seulement la solution à la faim dans le monde, elles peuvent également aider dans la lutte contre le changement climatique.
– Sasol
Sasol est une entreprise sud-africaine active dans les domaines de l’exploitation minière, de l’énergie, des produits chimiques et des carburants synthétiques (ou carburants de synthèse). Elle produit de l’essence à partir de charbon,procédé connu sous le terme de liquéfaction du charbon, en anglais « coal to liquids » (CTL), » une pratique polluante qui émet deux fois plus de gaz à effet de serre que le raffinage d’essence à partir de pétrole brut » selon les créateurs du prix.
– Shell
En 2009, Shell est devenue la plus grosse entreprise de la planète. » Le géant anglo-néerlandais du pétrole est également l’entreprise à l’intensité carbonique la plus élevée au monde: une étude récente réalisée par des ONG environnementales montre que le niveau moyen d’émissions de CO2 auquel correspond chaque baril de pétrole et d’essence produit par Shell va être amené à augmenter radicalement, s’élevant de 85% « , indique les concepteurs du Angry Marmaid Award.
Monsanto propose ses OGM comme solution au changement climatique !
Monsanto a proposé ses OGM » comme une solution au changement climatique » et a incité « à les utiliser pour la production de biocarburants« , souligne les organisations, outrées par le culot de la firme américaine.
Il faut notamment savoir que l’expansion des cultures de soja OGM en Amérique latine contribue massivement à la déforestation ainsi qu’à l’émission des gaz à effets de serre. La Table Ronde sur le Soja Responsable (RTRS), dont Monsanto est membre, défend activement la cause de l’entreprise en permettant au soja OGM d’obtenir le label de culture « responsable ». Le comble !
Monsanto a été nominé pour son lobbying en faveur de crédits carbone pour son soja « RoundupReady », cultivé pour produire des biocarburants. Le soja « RoundupReady » ne nécessite pas de labourage puisqu’il peut être vaporisé avec des herbicides. Ne pas labourer les champs laisse plus de dioxyde de carbone enfoui dans le sol. Seulement l’extension massive de monocultures de soja à travers l’Amérique Latine est responsable de la déforestation, de déplacements de populations, et de l’usage de quantités massives de désherbants toxiques à la place…
Pour Attac Danemark, Corporate Europe Observatory, Focus on the Global South, Friends of the Earth International, Oil Change International et Spinwatch : » Monsanto demande également que les cultures de soja génétiquement modifié soient financées par le Mécanisme de Développement Propre (MDP) qui permettrait aux industries pollueuses des pays développés de compenser leurs émissions par l’achat de crédits tirés de leurs cultures de soja OGM. La compensation est une fausse solution au changement climatique et ne permet pas de réduire les émissions dans les pays développés « .
Plus de détails sur l’ensemble des nominations.
S’exprimant au nom des organisateurs du prix, Paul de Clerck de Friends of the Earth International , déclare : « Monsanto a attiré les votes de milliers de personnes outragées par la promotion d’une forme d’agriculture si destructrice de l’environnement dans la lutte contre le changement climatique.
On ne doit pas autoriser les grands industriels à saboter le combat contre le changement climatique , en promouvant leurs intérêts particuliers. Tous les candidats du « grand prix de la sirène en colère » ont exercé de fortes pressions afin de préserver leurs profits individuels et d’empêcher une action efficace pour s’attaquer au changement climatique. Les gouvernements doivent cesser de les écouter et choisir à la place de vraies solutions à la crise climatique. »
Emilie Villeneuve