En 2013, 92% des cours d’eau surveillés contenaient des pesticides, rappelle France Nature Environnement (FNE). Un chiffre anormalement élevé. Le Service public d’information de l’eau, Eaufrance, notait pourtant un » mieux « , une baisse de 10% des teneurs en pesticides entre 2009 et 2014. L’évolution était contrastée selon les zones et surtout liée à un contexte climatique (pluies inférieures à la normale). Aussi, Eaufrance conseillait en juillet 2018 : » les efforts sont donc à poursuivre pour respecter les objectifs de bon état des eaux assignés par la Directive-Cadre sur l’Eau (DCE) « .
Malheureusement, un arrêté ministériel venait juste de donner du mou à ces efforts encore insuffisants. Que change cet arrêté ? Depuis mai 2017, les préfets ont davantage de pouvoir pour définir les » zones de non traitement « , des bandes de 30 cm à 5 mètres en bordure d’un point d’eau, sur lesquelles il est interdit d’épandre des pesticides. On aurait pu s’attendre à un effort de sécurité supplémentaire, compte tenu des graves pollutions que connaît la France. Mais non. » Contre toute logique, certains préfets en profitent pour être bien plus laxistes sur la protection de nos cours d’eau « , alerte FNE.
Sous la pression des lobbies, des zones protégées sont supprimées
» Auparavant, les préfets devaient s’appuyer sur les données contenues dans les cartes au 1/25 000eme de l’IGN. Avec le nouvel arrêté, plusieurs préfets ont choisi des cartes encore moins précises, élaborées souvent sous la pression de certains syndicats agricoles « , ajoute l’ONG
Le résultat est déjà là : de nouvelles cartes excluent de nombreuses zones et cours d’eau jusqu’alors protégés des pesticides. Exemples : dans le Tarn-et-Garonne, 30 % des aires préalablement protégées ont purement et simplement été exclues. En Indre-et-Loire, 43 % des zones de non traitement aux abords des cours d’eau ont disparues. Le Gard n’a pas échappé à la même logique. Il ne s’agit là que de quelques exemples. Une carte de FNE découvre les très nombreux départements concernés.
Aussi, l’ONG a réagi en déposant des recours contre une quarantaine d’arrêtés départementaux mais souligne que la cause du problème réside » dans la rédaction même de l’arrêté ministériel « . En parallèle, elle a lancé une pétition #LoinDesPesticides sur son site www.fne.asso.fr qui invite les Français à interpeller les ministres de l’Agriculture et de la Transition écologique et solidaire pour une meilleure protection des cours d’eau.
« Si la réduction de l’usage des pesticides est le meilleur moyen pour limiter la pollution de nos cours d’eau, l’interdiction d’épandage de pesticides à leurs abords s’avère une mesure de bon sens. Il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique et de protection de l’environnement : ne laissons pas les pressions locales aggraver la situation » explique FNE.
Anne-Françoise Roger