Accueil / Articles / Environnement / Réchauffement climatique : venir en aide aux pays les plus pauvres
changements climatiques

Réchauffement climatique : venir en aide aux pays les plus pauvres

Avatar photo

Mis à jour le

Publié le

Par Bioaddict

Tsunamis en Indonésie, séismes à Haïti, au Chili ou encore en Chine, inondations au Pakistan, incendies en Russie... la liste des catastrophes naturelles semble de plus en plus longue et toucher toujours plus durement les pays pauvres. Pour parvenir à un accord historique à Cancun, il est nécessaire d'écouter ceux qui paieront le prix fort du réchauffement climatique.

Réchauffement climatique : venir en aide aux pays les plus pauvres

Alors que les engagements pris à Copenhague ont négligé en grande partie l’avis des pays en développement, une étude de la Banque mondiale publiée l’année dernière, montre que ces mêmes pays vont supporter 80% des dégâts occasionnés par le changement climatique alors qu’ils ne sont à l’origine que de 30% des émissions de gaz à effet de serre.

Un classement réalisé par le cabinet d’analyse des risques Mapplecroft révèle que l’Asie du Sud et l’Afrique de l’Est sont en tête des régions les plus menacées. Les habitants du Bangladesh, de l’Inde et de Madagascar seront les plus durement frappés par le changement climatique dans les trente ans qui viennent, suivis par ceux du Népal, du Mozambique, des Philippines, d’Haïti, de l’Afghanistan, du Zimbabwe et de la Birmanie. À l’extrémité opposée, les pays qui s’en sortiraient le mieux sont la Norvège, la Finlande et l’Islande, talonnés par l’Irlande, la Suède et le Danemark. Cette étude, publiée le 20 octobre, a utilisé 42 indicateurs de sensibilité aux changements climatiques parmi lesquels figuraient la démographie du pays, l’état de son agriculture, de son système de santé, de ses infrastructures ainsi que la capacité de ses institutions, de son économie et de sa société à s’adapter au changement climatique.

L’étude montre ainsi que l’injuste corrélation pays pauvre/pays durement touchés s’explique souvent par les conditions de vies précaires : forte pression démographique, économie très dépendante de l’agriculture, fragilité des édifices… La catastrophe qui survient dans des régions d’extrême pauvreté, peu préparées à des situations d’urgence, causera bien plus de mal.

La bataille des chiffres

Face à l’injustice climatique, les pays développés s’étaient engagés dans l’accord de Copenhague à verser une aide financière aux pays les plus pauvres. Le Fonds vert pour le climat devrait permettre de mobiliser 100 milliards de dollars d’ici 2020 afin d’aider les pays en développement à préparer de leurs politiques d’atténuation et d’adaptation au réchauffement climatique. 30 milliards de dollars de fonds précoces à verser avant 2012 ont été créés comme gage de bonne volonté. La France a ainsi promis de fournir une aide de 1,24 milliard d’euros sous trois ans, soit 420 millions d’euros par an. Mais au-delà des belles promesses et des beaux discours, il semble que la France et d’autres pays de l’Union Européenne aient encore bien des progrès à faire.

Ces fonds sont-ils  » nouveaux et additionnels  » ?

Ces fonds sont-ils  » nouveaux et additionnels  » ?

Si l’accord de Copenhague précise que ces fonds doivent être  » nouveaux et additionnels « , il n’a jamais été apporté de définition claire à ces principes. Ces imprécisions permettent aux différents pays signataires d’organiser les modalités de paiement comme ils l’entendent.

Ainsi, dans le cas de la France, plusieurs ONG estiment qu’une bonne partie des engagements financiers sont en réalité déjà compris dans l’aide publique au développement. Il n’y aurait donc pas un dégagement de nouveaux fonds verts, juste une plus large part de l’aide au développement allouée à la lutte contre le réchauffement climatique.

Oxfam France et le Réseau action climat France ont publié mi-novembre un rapport destiné à dénoncer ces pratiques. Cette analyse des engagements français, intitulé  » Quai des Brumes « , montre que la France ne se donne pas les moyens de tenir ses promesses.  » Le rapport montre que non seulement la France gonfle artificiellement son aide sur le climat au détriment des populations auxquelles elle est destinée, mais également qu’elle traine des pieds sur la transparence de ses financement « , souligne Romain Benicchio d’Oxfam France.

Voir le rapport : http://oxfamfrance.org/Quai-des-brumes-suivi-des,930

Pour l’ONG, les pays développés doivent se mettre d’accord d’urgence pour rendre effectif ces fonds verts et tenir leurs promesses d’ici 2012.  » Pour rétablir la confiance entre les nations riches et pauvres et remettre les négociations sur les rails en vue d’un accord global, ces questions doivent être officiellement approuvées par la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) à la COP-16, qui se tiendra à Mexico en décembre 2010 «  déclarait Oxfam France sur son site internet.

Pour se défendre, la délégation française déclare qu’il n’est pas possible de débloquer de l’argent si tardivement dans l’année 2010, et que la France ayant déjà augmenté ses efforts, elle n’a pas à augmenter ses efforts.  » Elle faisait du financement fast start sans le savoir, comme M. Jourdain de la prose « , selon l’expression de Brice Lalonde, ambassadeur climat pour la France.

Malheureusement, il n’existe pas de cadre centralisateur des informations sur les financements, ce qui rend difficile le contrôle du respect des engagements.

Dons ou prêts, gare aux confusions !

Dons ou prêts, gare aux confusions !

Un autre point de débat est la répartition des fonds entre prêts et dons. Si les prêts peuvent être adaptés à certains projets mécaniquement rentables (en matière d’atténuation des émissions en particulier), d’autres projets liés à l’adaptation, qui nécessitent de forts investissements et mettent en jeu la responsabilité des pays développés, nécessitent des soutiens publics sous forme de dons. La plupart des ONG appellent ainsi à augmenter la part de dons dans les contributions, certains pays en voie de développement étant déjà très endettés.

Aux critiques des ONG, l’Union européenne rétorque que ces prêts sont accordés selon le respect du  » cadre pour l’endettement soutenable  » (debt sustainability framework), et que les dons seraient un gaspillage sur des secteurs rentables.

Si ces deux arguments peuvent être admis, ils restent insuffisants pour ceux qui considèrent qu’il est biaisé de comptabiliser prêts et dons dans un seul et même fonds. Ces deux mécanismes n’ont pas la même portée, et pourtant, les 2,2 milliards d’euros français débloqués en 2010 sont indifféremment prêtés ou donnés.

Enfin, on reproche aux fonds verts qu’ils ne soient pas suffisamment alloués à l’adaptation des pays aux changements climatiques. La part destinée à l’adaptation ne représenterait que 20% de ces financements précoces, alors que, comme le souligne Oxfam dans une note d’information, ils ne devraient pas être considérés comme  » une aide, mais bien une obligation de soutien pour prévenir les dommages dans les pays pauvres, dus à l’excès d’émissions dans les pays riches « .

Malgré les efforts de transparence de l’Union Européenne -avec la publication d’un rapport au début du mois de novembre- la France semble faire office de mauvaise élève. Quelle sera son influence sur des pays qui se sont montrés plus solidaires tel que l’Allemagne ?

Allocations inégales, chiffres contradictoires, polémique sur le mélange des  » dons  » et  » prêts  » dans les financements feront donc partie des questions à résoudre avant la clôture ce vendredi du sommet de Cancun. Mme Kosciusko-Morizet qui est arrivée hier dans la station balnéaire, proposera-t-elle une évolution de la position française sur ces enjeux ?

Alicia Muñoz

Info+

Le réchauffement climatique en termes monétaires

Le rapport Nicolas Stern, publié en octobre 2006, évalue que le réchauffement climatique coûtera minimum 5.500 milliards d'euros dans les 10 prochaines années.

La Banque mondiale a consacré une étude aux pays pauvres, financée par les gouvernements britannique, néerlandais et suisse. Elle révèle que l'adaptation au changement climatique leur coûtera 75 à 100 milliards de dollars par an entre 2010 et 2050. Nicholas Stern évoquait déjà cet impact trop lourd : "le changement climatique en Inde et en Asie du sud Est pourrait entraîner une perte de 9 à 13% du PIB d'ici 2100".

Les financements dans l'accord de Copenhague

L'accord de Copenhague prévoit la création d'un " fonds vert " mondial pour aider les pays pauvres à faire face au réchauffement climatique. Celui-ci devrait atteindre 100 milliards de $ (soit 73 milliards d'euros) en 2020. L'accord comprend également la promesse des pays développés de fournir 30 milliards de dollars (soit 22 milliards d'euros) par le biais de paiements précoces dits " fast start " entre 2010 et 2012. Ces fonds verts aident les pays les plus touchés par le réchauffement climatiques dans trois domaines : les projets de lutte contre la déforestation, les projets de développement des énergies renouvelables et les projets d'adaptation aux conséquences du réchauffement climatique.

Selon les prévisions de l'association Oxfam, 375 millions de personnes pourraient être touchées par les catastrophes climatiques d'ici à 2015. (Le droit de survivre, OI, 2009)

Le GIEC estime qu'en 2080, 3,2 milliards de personnes, soit un tiers de la population mondiale, manqueront d'eau et que 600 millions manqueront de nourriture.

D'ici cinquante ans, le changement climatique risque de jeter sur les routes 200 millions de déplacés et réfugiés privés de toit et de moyens de subsistance.

Lire : 20 millions de réfugiés climatiques en 2008, un milliard en 2050?

Partagez cet article