Le profil du consommateur bio n’est pas ce que l’on croit
Réservé à une minorité plutôt aisée et très engagée il y a quinze ans, le bio se diffuse désormais dans les catégories les plus modestes : ainsi, selon une étude du CREDOC publiée en août, 52 % des personnes disposant de moins de 900€ par mois consomment aujourd’hui des produits issus de l’agriculture biologique, contre 20 % en 1995. Selon cette même étude, 60 % des jeunes achètent de temps à autre ce type de produits alors qu’ils n’étaient que 26 % il y a quinze ans.
La préoccupation pour l’environnement n’est pas la seule explication de l’essor de ces denrées, qui jouissent aussi d’une image positive pour la santé et pour le goût. L’augmentation de l’offre en rayon et la bonne identification du label AB facilitent aussi cet engouement. Mais la progression des ventes bio est d’autant plus notable que la hausse des prix des denrées alimentaires et l’augmentation du coût du logement ont renforcé, ces dernières années, les contraintes budgétaires de nos concitoyens.
Les consommateurs sont devenus des consom’acteurs
Moins fréquent, mais sans doute plus révélateur de l’émergence d’un nouveau rapport à la consommation, le boycott de produits gagne petit à petit du terrain : en 2010, 33 % des Français disent avoir au moins une fois boycotté certains produits ; la proportion n’était que de 26 % en 2002.
Le regain d’intérêt pour les produits fabriqués en France, enregistré notamment dans plusieurs enquêtes récentes du CRÉDOC, conjugue quant à lui une forme de solidarité économique avec les salariés et les entreprises françaises et des considérations écologiques : acheter ce qui est fabriqué en France plutôt qu’à l’étranger limite les pressions qu’exercent les transports sur l’environnement.
Toutes ces manifestations d’une consommation plus responsable et réfléchie s’accompagnent d’une vigilance et d’une exigence plus fortes des ménages, lesquels semblent de plus en plus avertis et rétifs aux sirènes du » marketing vert « . Seuls 31 % des Français considèrent ainsi aujourd’hui que les informations présentes sur les produits verts sont scientifiquement fondées. Et tout juste un quart de la population estime qu’elles sont claires. Les allégations écologiques entourant les produits de grande consommation, via les publicités ou encore les logos auto-décernés( » 100 % naturel « , » respectueux de l’environnement « , etc.) concourent en effet à renforcer le soupçon de » green washing « . Le trop plein de communication vient ainsi décrédibiliser l’information sur les produits et contribue à brouiller les messages.
Ainsi, en matière de consommation responsable, les Français sont passés des bonnes intentions aux bonnes pratiques. La crise économique semble notamment les avoir poussé à réfléchir quant aux bien-fondé du rejet de notre société de surconsommation.
Stella Giani