Une interview de Stéphane Leroyer, expert technique chez Ecocert.
Comment sont conservés les aliments certifiés biologiques, afin de maintenir la sécurité du consommateur tout en utilisant des substances non nocives ?
Une cinquantaine de conservateurs sont actuellement utilisés dans l’industrie agro-alimentaire , mais seulement 8 sont autorisés en bio :
– le dioxyde de soufre (E 220) ou le métabisulfite de potassium (E 224) dans le cidre, le poiré, les vins de fruits (autres que de raisin*) et l’hydromel avec des teneurs maximum d’utilisation ;
– le métabisulfite de sodium (E 223) pour les crustacés ;
– le nitrite de sodium (E 250) ou le nitrate de potassium (E 252) pour les produits à base de viande avec des teneurs maximums d’utilisation ;
– l’acide lactique (E 270) sans conditions particulières d’utilisation ;
– le dioxyde de carbone (E 290) sans conditions particulières d’utilisation ;
– l’acide malique (E 296) uniquement dans les produits d’origine végétale.
L’acide acétique (E 260) n’est pas autorisé, en revanche il est possible d’utiliser du vinaigre bio.
En plus des conservateurs, certains antioxydants sont également autorisés :
– l’acide ascorbique (E 300) dans les produits d’origine végétale et les produits à base de viande ;
– l’ascorbate de sodium (E 301) dans les produits à base de viande ;
– l’extrait de tocophérol (E 306) dans les graisses et les huiles ;
– les extraits de romarin BIO (E 392) obtenus par extraction à l’éthanol.
*NB : le vin est un cas à part en bio, il n’existe pas actuellement de règles de vinification biologique. Seul le raisin est certifié dans le vin, c’est la raison pour laquelle le vin n’est pas certifié comme un produit biologique à part entière mais comme » un produit à base de raisins biologiques « . Cette situation est transitoire. Un cahier des charges européen sur la vinification biologique est attendu prochainement. Il portera notamment sur les sulfites encore actuellement utilisés pour conserver les vins bio.
Pourrait-on être encore plus strict et réduire la liste des conservateurs autorisés ? Certains conservateurs, comme le nitrite de sodium sont critiqués…
Ceci ne dépend pas des Organismes certificateurs, la liste des additifs autorisés est établie par la Commission Européenne, elle est susceptible d’évolution. Il existe un groupe d’Experts au niveau de la Commission Européenne qui donne son avis sur l’éventuel ajout ou retrait de substances dans cette liste.
Le retrait des E 220, 224, 250 et 252 de la liste a été envisagé dans le cas où des solutions de remplacement seraient trouvées. A ce jour, ils sont toujours autorisés, il semble donc qu’aucune alternative satisfaisante n’ait été trouvée. Cela veut dire que, sans y recourir, on ne peut conserver les denrées alimentaires dans des conditions satisfaisantes d’hygiène prévues dans la législation générale.
En plus des agents conservateurs il existe des techniques pour sécuriser les aliments. Quelles sont celles utilisées dans le bio ?
On peut utiliser dans le bio les procédés classiques de conservation qui fournissent des conditions défavorables au développement des agents pathogènes, en s’appuyant sur des process thermiques (congélation, surgélation, stérilisation, pasteurisation, …) ; en utilisant des procédés qui éliminent l’eau, comme le séchage, la déshydratation ou l’atomisation ; en conditionnant sous vide ou sous atmosphère protectrice (utilisation d’azote ou de CO2 autorisée) ; en utilisant de la saumure, ou encore en utilisant le vinaigre bio.
Il faut savoir que l’irradiation ( également appelée ionisation ou pasteurisation à froid) n’est pas autorisée en bio. En revanche l’utilisation de micro-ondes ou d’UV est permise.
Certains produits sont plus sensibles que d’autres.
Oui, les produits frais ou les matières premières brutes n’ayant pas subi de traitement de conservation sont forcément plus sensibles.
Il faut donc être vigilant notamment sur le développement de mycotoxines, conséquence de mauvaises conditions de stockage (pour les céréales par exemple).
Comment sont conservés les fruits et légumes bio après récoltes ?
Les conditions de stockage (paramètres fraicheur, humidité, lumière à maitriser et adapter en fonction du type de produits) sont primordiales car aucun traitement post-récolte des fruits et légumes à l’aide de produits phytopharmaceutiques (pesticides) n’est autorisé dans le bio. Seul le sulfate d’aluminium peut être utilisé pour ralentir le mûrissage des bananes.
Propos recueillis par Caroline Chavigny